Discussion générale sur le projet de loi Urgence pour Mayotte

Mayotte est dévastée.

Et, plus que jamais, nous devons prendre nos responsabilités. 

Le passage du cyclone Chido a frappé durement ce territoire, plaçant — plus encore — sa population dans une précarité sociale et économique extrême. 

Nous pouvons le dire, dans un état d’urgence humanitaire alarmant. 

Les bidonvilles abritant des milliers de personnes pauvres ont été anéantis, les laissant sans abri, sans accès à l’eau potable, sans nourriture, ni soins médicaux. 

Mayotte fait aujourd’hui les comptes de ses pertes humaines. 

Cette situation d’urgence ne doit pas nous éloigner de nos ambitions humanistes. Nous devons prendre soin de toutes les victimes de ce cyclone quelle que soit leur régularité administrative.

Il en va de notre dignité. 

Ne pas le faire, serait un accroc dans notre pacte républicain. 

Ce cyclone témoigne aussi du sous-développement dont étaient déjà victimes les mahoraises et les mahorais. 

Rappelons que dans cette partie de la France,
→ 77% de la population vit sous le seuil de pauvreté,
→ 70% des enfants sont scolarisés et encore, un jour sur trois,
→ rappellons que le chômage y est 5 fois plus important qu’en hexagone. 

Alors, comment reconstruire une société quand l’accès à l’éducation,à la santé, à la formation professionnelle et aussi  l’accès à un emploi décent sont restés si longtemps une promesse vide ? 

L’urgence ne réside pas uniquement dans la réparation, mais dans la garantie d’un cadre de vie digne, de possibilités d’émancipation, de conditions de travail et d’apprentissage adaptées aux besoins des Mahorais. 

La situation sur le terrain ne pourra s’améliorer que si des investissements durables sont réalisés dans les infrastructures éducatives et sanitaires, afin d’éviter qu’une partie de la population ne soit à jamais laissée sur le bas-côté.

Il y a l’urgence humaine, et il y a aussi une urgence écologique. 

Mayotte abrite un écosystème unique, un patrimoine naturel d’une richesse inestimable. 

Son lagon, le deuxième plus grand au monde, abrite des espèces marines menacées comme le Dugong. Ce mammifère marin emblématique de Mayotte, déjà en danger, a vu ses herbiers marins détruits, source principale de son alimentation, mettant encore plus en péril sa survie. 

Le cyclone Chido a dévasté les infrastructures humaines mais il a aussi endommagé des écosystèmes vitaux : destruction des forêts et des récifs coralliens , pollution des eaux et des sols . La biodiversité en ressort totalement  appauvrie.

Nous ne pouvons pas reconstruire Mayotte en négligeant la protection de ces écosystèmes exceptionnels. 

Ce projet de loi ne prévoit pas de mesures concrètes pour restaurer ces habitats naturels.

C’est pourtant une priorité importante. 

Mayotte doit se reconstruire aussi dans le respect de son environnement, avec des infrastructures résilientes et respectueuses de la nature.

L’ampleur des dérogations dans le domaine de l’urbanisme risque de remettre en cause les normes de sécurité et d’habitabilité des futurs bâtiments. 

Ce projet de loi est totalement insuffisant et se contente de réponses très temporaires. 

Les dispositifs d’accompagnement social et économique ne sont garantis que pour une durée de deux mois. 

C’est incompréhensible, monsieur le Ministre.

Maintenant, il faut s’attaquer au véritable sujet : la pauvreté de la majorité des mahoraises et mahorais .

Comment faire quand le financement de cette reconstruction est largement insuffisant

⇾   Les 100 millions d’euros prévus pour la mission Outre-mer dans le PLF sont loin de suffire pour répondre à l’ampleur de la tâche, estimée à plus de 2 milliards d’euros.

Chers collègues,  nous ne pouvons pas accepter qu’un territoire et que ces habitants, aussi riche en forces vives et en biodiversité, soit laissé sur le côté, abandonné à son destin. 

La reconstruction de Mayotte doit être un projet global et durable, prenant en compte les enjeux humains, sociaux et écologiques. 

Ce n’est qu’à cette condition que Mayotte pourra sortir du cycle infernal de la précarité et de l’abandon, et que ses habitants pourront enfin envisager un avenir digne, respectueux de l’environnement et des droits de tous. 

Assumons nos responsabilités, monsieur le Ministre.

Mayotte mérite plus qu’un pansement sur une plaie béante.